LA VIERGE AU CHANCELIER ROLLIN de JEAN VAN
EYCK
Ou LA REINE DU SILENCE
C’est un merveilleux tableau qui se
trouve au Louvre.
Il nous enseigne ce que la Vierge a enseigné toute sa vie:
LE SILENCE,
le vrai silence intérieur qui est la seule voie qui nous permette d’atteindre l’invisible.
Ce qui m’a frappée d’abord, c’est que le visage de la Vierge ressemble à celui de l’Ange comme pour nous dire que la Vierge appartient déjà au monde céleste.
Les ailes de l’Ange ont les couleurs de
l’arc en ciel car nos yeux sont incapables de voir la lumière blanche céleste qui se décompose alors quand l’Ange prend une apparence terrestre.
Le tableau a la forme d’une croix dont
le symbole est la liberté de l’homme entre la ligne de l’éternel présent vertical qui mène à l’intérieur du soi éternel
et la ligne horizontale de la vie extérieure de l’homme qui s’étend dans le temps et l’espace quand il conjugue le verbe avoir. Seul le silence permet
d’atteindre la ligne verticale de l’être intérieur .La Vierge Marie nous apprend le silence. Elle est la reine du silence qui seul permet d’ouvrir la porte du royaume invisible. Sa royauté se
voit à son manteau rouge et à sa couronne.
Mais il y a deux sortes de silence: le
silence extérieur et le silence intérieur.
Sur ce tableau, le silence est délimité
par la ligne horizontale de la promenade du château où se trouvent les deux petits personnages qui se penchent vers le monde extérieur. Cette ligne est coupée en son milieu par une ligne
verticale invisible. Au centre de cette croix qui est le centre du tableau se trouve un groupe de lis blancs, symbole de pureté. A gauche de ce centre fleuri, il y a deux pies dites bavardes: ce
tableau est vraiment la représentation du silence qui règne à l’intérieur de la pièce.
Mais le vrai silence ne se trouve qu’à droite: La Vierge et l’Ange ont
le regard tourné vers leur être intérieur et portent des manteaux de couleur unie: Rouge pour la Vierge symbolisant la royauté et l’amour parfait. Bleu pour l’Ange ainsi que le prie-Dieu et la
robe de la Vierge que l’on devine, le bleu étant la couleur de l’au-delà qui s’élève comme la flamme de la bougie vers la lumière blanche aveuglante de Dieu qui contient toutes les couleurs.
L’enfant Jésus a les yeux ouverts mais il a le regard intérieur et lointain qui englobe tout l’univers de l’infiniment petit à l’infiniment grand.
A gauche, le chancelier Rollin prie dans le silence mais son silence
n’est pas intérieur .Son regard est horizontal: Il regarde à l’extérieur la Vierge et l’enfant Jésus. Son habit est décoré de dessins qui montrent son attachement à l’apparence extérieure. Au
dessus de sa tête, les sculptures des chapiteaux symbolisent toutes les pensées qui
l’assaillent, et juste à côté de lui, à l’extérieur, trois paons indiquent ses désirs d’ascension sociale. Même si, les mains jointes, le chancelier est en attitude de prière, le livre ouvert sur
le prie-Dieu atteste que sa prière ne vient pas de l’intérieur.
A l’extérieur, le fleuve qui provient des neiges éternelles de la
montagne serpente dans la nature et coupe la ville en deux, manifestant ainsi la loi de la dualité de notre monde terrestre.
Les deux parties de la
ville sont reliées par un pont où passe la foule des êtres qui ne vivent que sur la ligne horizontale de l’existence dans le bruit et la course au verbe avoir.
Seuls deux petits personnages se sont arrêtés dans l’axe de la ligne
verticale du centre du tableau où serpente le fleuve qu’ils regardent couler.
L’eau du fleuve qui
provient des neiges silencieuses et éternelles de la montagne est le symbole de l’éternel présent qui contient le passé, le présent et le futur. L’éternel présent est sur la ligne verticale, là où il n’y a plus ni espace, ni temps. Atteindre cet
éternel présent intérieur est une élévation vers le sommet de la montagne que l’on ne distingue jamais quand on entreprend l’ascension, parce que ce sommet que l’on peut appeler Dieu, c’est le
point qui contient Tout et d’où Tout provient.
Tout paysage, aussi laid
soit-il, retrouve la beauté quand il est recouvert de neige, la beauté dans le silence, ce qui prouve que la beauté réelle est intérieure et
silencieuse. Le silence intérieur est nécessaire pour atteindre le sommet intérieur et quand on l’a atteint, on ressent alors une grande joie et un grand sentiment de
sérénité.
Blanche DREVET
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