La neige est partie avec Mars, mais lui, il est toujours là en souvenir de sa blancheur :
LE PERCE-NEIGE
Un jour de février,
Sa mince tige verte
Et ses feuilles effilées osèrent
Percer le scintillant tapis
De la neige !
On l’appela Perce Neige !
Pour se faire pardonner,
Il se pencha pendant des heures
Avec tant de modestie,
Que ses quatre pétales
Gardèrent l’éclat
De sa blancheur !
Blanche DREVET
Recueillement
Dans le silence de la forêt d’hiver
Les arbres se recueillent.
La plupart ont perdu leurs feuilles
Mais ils ne sont pas tristes.
Un invisible artiste,
Peintre et sculpteur,
Leur a offert avec son cœur
De splendides vêtements de prières.
Blanche DREVET
Mon petit appareil a zoomé huit échantillons que voici :
de haut en bas : le charme, l’acacia, le hêtre, le châtaignier, le pin, le chêne, l’épicea, le sapin
Nous sommes en février, mais d’où vient le nom de ce mois ?
Le roi Numa Pompilius, deuxième roi légendaire de Rome après Romulus, a consacré ce mois au dieu Neptune mais n’a pas donné le nom de ce dieu au douzième mois de l’année ; il lui a donné le nom de februarius du latin februare qui signifie purifier. En effet, en ce mois d’hiver où la nature se repose avant la
résurrection du printemps, on célébrait à Rome les fêtes publiques expiatoires appelées februales en l’honneur des morts. Il fallait se
purifier avant de renaître et recommencer une nouvelle année. C’est César qui a décidé de faire commencer l’année au premier janvier en
fonction non pas des saisons mais du rallongement des jours ; ce qui est bizarre, c’est que nous continuons à garder des traces de l’ancien calendrier avec les noms des mois de septembre,
octobre, novembre et décembre, septième, huitième, neuvième et dixième mois de l’année !
Alors, si nous considérons février comme le douzième mois de l’année qui termine le cycle des quatre saisons, celui où la
nature se repose avant de recommencer un nouveau cycle, je vous invite à une autre purification , celle du plongeon dans le bleu de l’infini qui vide notre mental dans l’instant et nous offre l’or de la joie profonde
CONTE BLEU et OR
Il avait choisi ce rectangle d’or
Où s’était écoulée translucide
L’eau bleue du royaume des glaces.
Il s’y reposait depuis de longues aurores
Sans laisser de traces à la surface
De ce ciel de pureté liquide.
Mais un soir, son sommeil fut déchiré
Par trois voix humaines aux notes aigües.
Elles provenaient de trois baigneuses nues
Qui, s’étant déshabillées, regardaient
D’un œil gourmand l’eau azurée
De cette piscine inattendue.
Réveillé, il sortit sans bruit de son lit de
lumière
Mais, avant de déployer ses ailes
étincelantes
Son œil de saphir transperça les trois
commères
Qui se turent. Elles sentirent une paix
inquiétante
Alourdir leurs jambes, leurs corps s’enliser dans la
pierre
Rendant muette leur éternité souffrante.
Elles n’eurent pas le temps de voir
s’envoler
Celui qui les avait immortalisées
Avant de retourner dans le pays où les
flocons
De neige moutonnent le relief, étouffent les
sons,
Epousent les branches, les brindilles et
dansent
Devant les yeux des loups argentés,
Gardiens farouches de la secrète entrée
Du royaume des glaces bleues.
Celui dont le nom lumineux
Est Silence.
Blanche
DREVET
En cette année 2013, j’ai choisi une autre occupation que l’écriture mais je ne veux pas vous quitter car vos pensées et vos blogs m’enrichissent beaucoup. Mon blog marchera au ralenti et je
publierai souvent des textes déjà publiés… En tous cas, ce ralenti ne m’empêchera pas d’avoir le plaisir de vous rendre visite ! A bientôt !
LA NEIGE
Le vent s’est tu dans la forêt
d’hiver.
Les grands arbres noirs se
reposent
Sous le pur manteau de
silence
Qui m’enveloppe,
immense.
Au plus profond de mon
être
Naît une rose
A la peau d’ivoire.
Je ressens sa chaleur
Palpiter doucement
Au rythme du grand
Cœur
Brûlant
Dans les milliers
D’étoiles
De cet univers blanc.
Blanche DREVET
En cette fin de novembre 2012, j’ai été témoin imaginaire
d’une très belle rencontre entre le hêtre de ma forêt que je salue souvent et qui flamboie à la mi-novembre et deux pages du livre « Un roi
sans divertissement » de Jean GIONO (1895-1970) qui, en décrivant le hêtre de la scierie, donne vie à un arbre avec des mots qu’il est seul
capable de modeler.
Grand marcheur dans son pays natal de Haute Provence,
Jean GIONO nous invite à le suivre et à plonger consciences humaines parmi les consciences minérales et végétales d’une nature où se cachent les dieux et les déesses de l’Antiquité.
Je souhaite que ce texte vous procure comme à moi une
douce ivresse devant la beauté de ce hêtre majestueux.
Le hêtre de la scierie n’avait pas encore, certes, l’ampleur que nous lui voyons. Mais, sa jeunesse ou plus exactement son
adolescence était d’une carrure et d’une étoffe qui le mettaient à cent coudées au-dessus de tous les autres arbres, même de tous les autres arbres réunis. Son feuillage était d’un dru, d’une
épaisseur, d’une densité de pierre, et sa charpente (dont on ne pouvait rien voir, tant elle était couverte et recouverte de rameaux plus opaques les uns que les autres) devait être d’une force
et d’une beauté rares pour porter avec tant d’élégance tant de poids accumulé.
Il était
surtout, à cette époque, pétri d’oiseaux et de mouches ; il contenait autant d’oiseaux et de mouches que de feuilles. Il était constamment charrué et bouleversé de corneilles, de corbeaux et
d’essaims ; il éclatait à chaque instant des vols de rossignols et de mésanges ; il fumait de bergeronnettes et d’abeilles ; il soufflait des faucons et des taons ; il
jonglait avec des balles multicolores de pinsons, de roitelets, de rouges-gorges, de pluviers et de guêpes. C’était autour de lui une ronde sans fin d’oiseaux, de papillons et de mouches dans
lesquelles le soleil avait l’air de se décomposer en arcs-en-ciel comme à travers des jaillissements d’embruns.
Et, à l’automne, avec ses longs poils cramoisis, ses mille bras entrelacés de
serpents verts, ses cent mille mains de feuillage d’or jouant avec des pompons de plumes, des lanières d’oiseaux, des poussières de cristal, il n’était pas vraiment un arbre. Les forêts, assises
sur les gradins des montagnes, finissaient par le regarder en silence.
Il crépitait comme un brasier ; il dansait comme seuls savent danser les êtres surnaturels, en multipliant son corps
autour de son immobilité ; il ondulait autour de lui-même dans un entortillement d’écharpes, si frémissant, si mordoré, si inlassablement repétri par l’ivresse de son corps qu’on ne pouvait
plus savoir s’il était enraciné par l’encramponnement de prodigieuses racines ou par la vitesse miraculeuse de la pointe de toupie sur laquelle reposent les dieux. Les forêts, assises sur les
gradins de l’amphithéâtre des montagnes, dans leur grande toilette sacerdotale, n’osaient plus bouger.
Jean GIONO
« Un roi sans divertissement »