L’inspiration pour écrire un texte avec toutes les lettres de l’alphabet, comme nous l’a proposé Domi, ne m’est malheureusement pas venue. J’ai donc choisi de vous parler d’une merveilleuse science, la graphologie, qui étudie le comportement de l’être humain en analysant le dessin de chaque lettre de son écriture.
Chassée par toutes les facilités qu’offre l’ordinateur, la graphologie est entrée en hibernation, mais j’espère qu’elle ne disparaitra pas car écrire sur une feuille de papier est un acte créateur alors que taper sur une touche de clavier ne l’est pas. Je pense que celles et ceux qui aiment encore écrire avec un stylo me comprendront.
Il existe encore des livres sur la graphologie. J’en ai choisi un qui doit encore peut-être exister car il est paru il y a presque vingt ans. Il m’a fait non seulement fait découvrir le monde caché de l’écriture, mais m’a permis de me découvrir moi-même et d’évoluer spirituellement.
Le livre de Sylvie Chermet-Carroy « La Graphologie Autrement » nous relie à la civilisation égyptienne qui, avec l’écriture, est à l’origine de notre civilisation.
Je vais essayer de vous en donner un petit aperçu avec les treize premières lettres de notre alphabet.
Il convient de faire une différence entre l’apparition de l’écriture et celle de l’alphabet qui est une autre étape dans la conceptualisation de l’écrit.
Plus de 3000 ans avant JC, la panoplie des 21 signes hiéroglyphiques égyptiens existait déjà. Si leur origine demeure mystérieuse, l’histoire de leur divulgation par les hébreux, les phéniciens, les grecs puis les romains, nous permet d’affirmer que presque toutes nos lettres latines ont pour origine un hiéroglyphe égyptien.
« Hiéroglyphe » vient du grec « hieros » qui signifie sacré et de « gluphein » qui signifie graver : c’est l’écriture sacrée qui était l’apanage des prêtres et des hauts dignitaires de la société égyptienne. Les hiéroglyphes exprimaient une cosmologie, une histoire de la naissance du monde et le lien qui existe entre l’homme et l’univers. Le hiéroglyphe contient plusieurs niveaux d’interprétation car l’image obtenue pour exprimer un son ou une idée suggère parallèlement une dimension cachée mettant l’accent sur l’homme et son évolution.
En s’appuyant sur la signification du hiéroglyphe à l’origine de chacune de nos lettres latines, cette méthode graphologique utilise les correspondances qui existent entre son symbolisme et la psychologie de l’être humain : chaque représentation graphique d’une lettre représente à la fois un son et un aspect psychique qui sont véhiculés par la forme de la lettre.
Voici, en résumé, le symbolisme du hiéroglyphe égyptien (He) qui se cache derrière chacune des 13 premières lettres de notre alphabet.
A : l’He est celui de l’Aigle qui signifie la force vitale, le soleil source de vie.
B : l’He est celui de la jamBe qui, posée sur le sol représente symboliquement l’évolution l’homme qui a réussi à se mettre deBout.
C : l’He est celui d’une Coupelle dans laquelle les constructeurs mélangeaient les matériaux Ce He contient une notion de réCeptivité des énergies.
D : l’He est celui d’une main ouverte représentant l’action humaine qui fait intervenir le pouvoir de Décision, d’où, peut-être, l’origine du petit mot Don.
E : l’He est celui d’une corde tressée en trois boucles, allusion à la conception ternaire de l’homme, corps-Esprit-âme, avec un courant continuel de descente de l’Esprit vers la matière et de remontée vers le monde de l’Esprit.
F : l’He à l’origine de notre F représente un petit reptile. Dans l’Egypte ancienne, on considérait les reptiles venant des eaux de l’océan comme les premiers êtres porteurs sur terre de la vie individualisée. Cet He signifie l’affirmation de l’individualité de l’être humain Fort ou Faible.
G : l’He est celui du portail d’un temple qui abrite un mystère ou celui de la ruche qui cache l’activité des abeilles. Il représente l’enveloppe matérielle des idées abstraites en relation avec leur absorption et leur transformation et nous indique si nous acceptons ou non de diGérer la vie.
H : l’He représente une construction en voie d’acHèvement. Elle est en corrélation avec le travail intérieur qui se manifeste dans la relation aux autres et sur le plan concret.
I : l’He qui est à l’origine de notre i représente un calame de roseau, Instrument que les scribes utilisaient pour tracer les hiéroglyphes, véhicule de la langue sacrée et de la connaissance. Ce calame symbolisait la puissance manifestée, le principe créateur masculin.
J : cette lettre n’existait pas dans l’Egypte ancienne ; elle correspond au même He que le I.
K : l’He de cette lettre représente un tamis ; c’est l’action mystérieuse des forces cosmiques qui se combinent pour créer un phénomène de vie. En graphologie cette lettre indique le magnétisme qui émane d’une personne.
L : Dans la langue de l’Egypte ancienne, il n’existait pas de hiéroglyphe correspondant au son L. La graphologie se tourne alors vers la douzième lettre hébraïque Lamed dont l’image symbolique représente le bras de l’homme, l’aiLe de l’oiseau, tout ce qui s’étend, s’éLève et se dépLoie. Le tracé de cette lettre renseigne sur l’expansion de la personnalité, le sacrifice ou l’égoïsme du scripteur.
M : l’He représente une chouette, c’est le symbole de la nuit, du froid, de la mort, de la passivité. C’est le royaume du soleil mort. Mais dans la conception égyptienne, ce royaume du soleil mort précède la renaissance de la lumière. C’est donc un moment de transformation, de Métamorphose qui est source de vie. Ce hiéroglyphe, la chouette, est de polarité féminine ; il fait équilibre au principe masculin représenté par l’aigle, symbole solaire (ce qui nous rappelle le Yin et le Yang de la philosophie chinoise). Cette lettre exprime l’attitude de la personne face à la mère et face à la mort.
Quand je me penche avec mon appareil photo sur la beauté d’une fleur où s’est posé un insecte,
les pensées de Jean-Marie PELT lues dans son livre passionnant
» Les plantes: amours et civilisations végétales »
me reviennent aussitôt en mémoire.
« Entre les insectes et les fleurs, des collaborations toujours plus fines, plus élaborées ont été mises en œuvre et améliorées au fil des millénaires. Du coléoptère ravageur et dévastateur qui ne réalise la pollinisation que par accident, à l’abeille méticuleuse et organisée, capable de déclencher dans la fleur des mécanismes de haute précision, quel chemin parcouru, quelle économie de moyens, quel progrès dans l’organisation et l’efficacité du travail !
L’insecte, en amenant la fleur à perfectionner son architecture, se contraint lui-même à développer ses propres facultés psychosociologiques. Tel est bien le secret de toute véritable histoire d’amour : car un couple n’est vraiment réussi que dans le souci partagé de progrès et de l’épanouissement de l’autre. C’est en se déprenant de soi qu’on s’éprend d’autrui. C’est en perdant la vie qu’on la gagne.
Les plus belles fleurs de nos jardins et de nos serres n’existeraient pas sans les insectes, nos horticulteurs n’intervenant qu’en dernier ressort pour achever des chefs-d’œuvre qui ne sont pas de leur fait. Et il n’y aurait sans doute jamais eu ni abeilles, ni papillons si, il y a cent millions d’années, les plantes n’avaient inventé « la fleur ». »
« Étrange complémentarité du végétal vert qui synthétise la matière vivante grâce à la chlorophylle et de l’animal au sang rouge qui la consomme en respirant, grâce à l’hémoglobine, molécule à peine différente de la précédente ! La plante crée la matière vivante, elle ne stoppe jamais sa croissance et synthétise sans cesse. Car il lui faut pourvoir à la nourriture de l’animal qui la consomme et aussi à celle de l’homme qui, sa croissance stoppée, se contente d’entretenir sa structure et, dans les meilleurs des cas, transforme son énergie en force spirituelle.
Il est en effet singulier de constater que les végétaux ne cessent d’élaborer de la matière vivante et de croître en taille et en volume, alors que la plupart des animaux atteignent au bout de quelques années leur maturité physiologique à partir de laquelle ils se contentent d’entretenir leur structure sans plus l’accroître. Ils sont devenus adultes, mais pourquoi faire ?
Pour l’homme, on pourrait modestement formuler une hypothèse : le développement corporel accompli, le surcroît d’énergie ainsi disponible ne pourrait-il pas s’investir dans d’autres tâches et vers d’autres directions, et pourquoi pas justement vers celles qui font l’originalité et l’honneur de l’homme : celles de l’esprit. C’est ce qu’avaient compris, semble-t-il, d’autres civilisations, d’autres cultures, mais non la nôtre toute occupée à produire toujours plus pour réjouir et ménager des corps déjà comblés grâce au progrès du confort et aux mille satisfactions de ce qu’il est convenu d’appeler « la vie moderne » : serait-ce là notre erreur ? Sans doute.
Car l’espèce n’a qu’un avenir : celui de son propre dépassement au-delà des limites de l’univers matériel qui l’emprisonne et la réduit en esclavage ; et l’individu n’a qu’un programme : celui de s’accomplir dans ce qui lui est unique, original et essentiel, à travers la qualité, l’authenticité et la vérité des relations d’amour qu’il lie avec autrui. Car il faut croire à l’amour, à toutes les formes d’amour, en ces temps tragiques de régression de l’amour. »
En cette fin de novembre 2012, j’ai été témoin imaginaire
d’une très belle rencontre entre le hêtre de ma forêt que je salue souvent et qui flamboie à la mi-novembre et deux pages du livre « Un roi
sans divertissement » de Jean GIONO (1895-1970) qui, en décrivant le hêtre de la scierie, donne vie à un arbre avec des mots qu’il est seul
capable de modeler.
Grand marcheur dans son pays natal de Haute Provence,
Jean GIONO nous invite à le suivre et à plonger consciences humaines parmi les consciences minérales et végétales d’une nature où se cachent les dieux et les déesses de l’Antiquité.
Je souhaite que ce texte vous procure comme à moi une
douce ivresse devant la beauté de ce hêtre majestueux.
Le hêtre de la scierie n’avait pas encore, certes, l’ampleur que nous lui voyons. Mais, sa jeunesse ou plus exactement son
adolescence était d’une carrure et d’une étoffe qui le mettaient à cent coudées au-dessus de tous les autres arbres, même de tous les autres arbres réunis. Son feuillage était d’un dru, d’une
épaisseur, d’une densité de pierre, et sa charpente (dont on ne pouvait rien voir, tant elle était couverte et recouverte de rameaux plus opaques les uns que les autres) devait être d’une force
et d’une beauté rares pour porter avec tant d’élégance tant de poids accumulé.
Il était
surtout, à cette époque, pétri d’oiseaux et de mouches ; il contenait autant d’oiseaux et de mouches que de feuilles. Il était constamment charrué et bouleversé de corneilles, de corbeaux et
d’essaims ; il éclatait à chaque instant des vols de rossignols et de mésanges ; il fumait de bergeronnettes et d’abeilles ; il soufflait des faucons et des taons ; il
jonglait avec des balles multicolores de pinsons, de roitelets, de rouges-gorges, de pluviers et de guêpes. C’était autour de lui une ronde sans fin d’oiseaux, de papillons et de mouches dans
lesquelles le soleil avait l’air de se décomposer en arcs-en-ciel comme à travers des jaillissements d’embruns.
Et, à l’automne, avec ses longs poils cramoisis, ses mille bras entrelacés de
serpents verts, ses cent mille mains de feuillage d’or jouant avec des pompons de plumes, des lanières d’oiseaux, des poussières de cristal, il n’était pas vraiment un arbre. Les forêts, assises
sur les gradins des montagnes, finissaient par le regarder en silence.
Il crépitait comme un brasier ; il dansait comme seuls savent danser les êtres surnaturels, en multipliant son corps
autour de son immobilité ; il ondulait autour de lui-même dans un entortillement d’écharpes, si frémissant, si mordoré, si inlassablement repétri par l’ivresse de son corps qu’on ne pouvait
plus savoir s’il était enraciné par l’encramponnement de prodigieuses racines ou par la vitesse miraculeuse de la pointe de toupie sur laquelle reposent les dieux. Les forêts, assises sur les
gradins de l’amphithéâtre des montagnes, dans leur grande toilette sacerdotale, n’osaient plus bouger.
Jean GIONO
« Un roi sans divertissement »
Je ne sais pas si Anna-Elisabeth, Comtesse de
Noailles, (1876-1933) (*), parisienne et écrivaine célèbre à son époque, a séjourné dans ce beau château de Noailles, mais je l’imagine très bien châtelaine écrivant ces vers délicats de bonheur sensuel
(**) dans le cadre de cet autre midi de la France où le soleil attire les cigales et où il fait bon vivre entre les deux souriantes rivières de la Corrèze et de la Dordogne, même pour les gens
simples qui ne demeurent pas dans un château !
L’été à midi,
Un store de paille est penché
Sur la vitre où le soleil donne,
La cloche de déjeuner sonne,
L’air sent la rose et le pêcher ;
Des guêpes de vol et de lucre,
Dans la claire salle à manger
Sont arrivées du potager
Pour le melon et pour le sucre.
Les compotiers sont pleins de fruits,
Les guêpes s’en vont et s’en reviennent ;
Les plats de faïence ancienne
Se fêlent d’entendre du bruit.
Soigneux de vos douces haleines,
Pour vous, beaux fruits d’un goût si fort,
Les couteaux ont des lames d’or
Et des manches de porcelaine …
(*)Comme moi, wikipedia vous en apprendra un peu plus sur Anna de Noailles
(**) La suite de ce poème se trouve dans « les cent poèmes du bonheur » aux éditions Omnibus
LE POUVOIR LA GRECE et SOCRATE
Durant la période de la course au pouvoir qui est celui de l’argent, j’ai regardé à la télévision des images très parlantes
sur la Grèce actuelle. Elles m’ont rappelé que deux peuples furent les héritiers du Savoir de l’Egypte de l’Antiquité, les hébreux puis les grecs dont on ne peut pas oublier les noms des grands
penseurs et savants et , en particulier, celui de Pythagore qui, au VI siècle avant JC, séjourna
en Egypte puis fonda une école d’initiés et celui de Platon qui, au IV siècle avant JC, voyagea aussi en Egypte , nous transmis dans ses
dialogues la sagesse de Socrate et créa le mot de philosophie. Héritière de l’Egypte Ancienne, la pensée grecque véhiculée par l’empire d’Alexandre puis par l’empire romain fut le berceau de
notre civilisation qui y a puisé bien plus que l’idée de démocratie.
Aujourd’hui, la Grèce est le premier pays de notre civilisation
européenne ruiné par la puissance de l’argent : c’est difficile de
ne pas y voir un signe.
Au XVIII siècle, siècle des lumières de la science et de la philosophie, la langue française était à la mode dans l’Europe
cultivée car les mots scientifiques et philosophiques de notre langue ont des racines grecques. Aujourd’hui où notre civilisation est tournée vers la consommation, c’est l’actuelle (actuelle car
les langues évoluent comme les êtres vivants) langue anglo-américaine qui prédomine car c’est une langue pratique pour la communication et le commerce. S’il s’agissait d’une véritable
communication entre les peuples, cette langue serait enrichissante, mais il est impossible de ne pas remarquer que l’anglo-américain est surtout la langue de la puissance financière. Qu’est-ce
qu’en penseraient Pythagore, Socrate et Platon s’ils revenaient ?
De tous temps, sur notre terre, il y a eu, il y a et il y aura des luttes de pouvoir entre les humains qui sont surtout
derrière les apparences des luttes économiques. Pour Platon comme pour Socrate, la philosophie, étymologiquement l’amour de la sagesse, est celle qui
est réellement vécue. Mais, qu’est ce que vivre la sagesse ? Platon, dans son œuvre De la République, a considéré l’être humain sous son aspect collectif, mais comme son maître Socrate, il
n’a pas oublié que l’être humain est aussi un être individuel qui, le jour de sa mort, se retrouve seul face à lui-même.
Platon, dans son « Apologie de
Socrate. », a rapporté ses paroles lors de son procès où, accusé d’avoir perverti les jeunes par ses
dialogues, il a été condamné à mort :
« Voici une autre manière de nous représenter combien il y a d’espoir que la mort soit un bien. Car de deux choses
l’une : ou bien être mort équivaut à n’être rien, et le mort n’a aucune perception de quoi que ce soit, ou bien, comme on le raconte, la mort se
trouve être une sorte de transformation et une transmigration de l’âme de ce lieu-ci vers un autre lieu. Si la mort est l’absence de toute perception, mais qu’elle soit semblable au sommeil quand
en dormant on ne fait même pas de rêves, ce serait un merveilleux gain que la mort ! Mais si d’un autre côté mourir consiste en une sorte de voyage de ce lieu-ci vers un autre lieu, et si ce
qu’on raconte est vrai, quand on dit que là-bas sont réunis tous les morts, quel bien trouverait-on qui soit plus grand que celui-là, Juges ? En effet, si en arrivant dans l’Hadès on est
délivré de ces individus, ici, qui se prétendent de juges, et si on doit y trouver les Juges véritables dont on raconte qu’ils rendent là-bas la justice avec tous les demi-dieux qui ont été des
justes pendant leur vie, est-ce qu’il faudrait donc dédaigner ce voyage ? Et puis rencontrer Orphée, Musée, Hésiode et Homère, que ne donneriez-vous pas pour ce bonheur ? Pour moi, je
veux bien mourir plusieurs fois, si c’est vrai… »
Socrate a fait son pari à une époque où aucune religion n’avait inventé l’enfer de l’Au-delà pour garder le pouvoir. Qu’il y ait ou non une sorte de tribunal dans
l’Au-delà, ce qu’offre son pari, c’est le choix qu’a l’être humain devant la mort comme devant une porte. Une porte qui donne soit sur le néant si les pensées de l’être humain sont celles d’un
athée qui choisit de n’avoir qu’une seule vie, soit sur un autre monde lumineux qui nous est invisible car nous sommes enfermés dans la matière, un monde où retourne l’âme après chaque vie et que
chacun cherche à imaginer selon l’évolution de sa pensée. Mais ce qui est plus important dans la pensée de ce grand Sage, c’est que pour commencer à s’élever, l’être humain doit tourner le dos à
la multitude de ceux qui ne vivent que dans les apparences, préoccupés des soucis matériels et acceptant tout enseignement sans réfléchir et il doit partir à la recherche de lui-même avec l’aide
des autres en regardant chaque jour la mort en face.
Blanche DREVET
Arnold BÖCKLIN (1827-1901) autoportrait avec la mort jouant du violon